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Votre santé

Le Bruxisme : qu'est ce que c'est ? Quelle est la meilleure prise en charge ? Pourquoi consulter un ostéopathe ?

Depuis la crise du Covid 19, les personnes qui serrent des dents sont en nette augmentation. Cette « crispation des muscles de la mâchoire va générer un contact répété entre les dents qui est à l’origine de troubles voir même de maladies se manifestant au niveau des dents et parfois même loin de la bouche », nous dit le professeur Francis Hartmann, spécialiste du bruxisme.

 

Aujourd’hui, il y a entre 20% à 30% des adultes qui font du bruxisme. Pourquoi sert-on des dents ? Est-ce que le port du masque a un impact sur le bruxisme ? Est-ce que les facteurs de stress influencent notre manière de nous comporter en nous faisant serer des dents ?

 

La plupart des personnes qui viennent consulter un ostéopathe et qui font du bruxisme ne consultent pas pour cette raison mais, sans le savoir, pour les conséquences qui résultent du bruxisme comme des douleurs à la mâchoire, des douleurs aux cervicales, des maux de tête…

Mais le bruxisme, qu’est-ce que c’est ?

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Le bruxisme n’est pas une maladie mais un comportement. Dans le jargon médical c’est ce que l’on appelle une « parafonction manducatrice», c’est-à-dire un comportement accessoire et non utile au bon fonctionnement de la mâchoire et de son environnement contrairement aux « fonctions » normales : la respiration, la déglutition, la mastication et la phonation. D’autres parafonctions sont la succion du pouce ou l’onychophagie (se ronger les ongles) par exemple qui ont également de graves conséquences comme l’ouverture de béance ou des résorptions radiculaires (réduction de la racine des dents en réponse à des forces contraires). Au niveau buccal, le bruxisme créé des usures anormales et va parfois jusqu’à la fracture de dents.

Le College National des Enseignants en Odontologie ( https://cneoc.fr/) définit le Bruxisme comme suit :

 

« Activité motrice, répétitive et involontaire des muscles manducateurs (ARMM), continue ou rythmique, avec ou sans contacts dentaires. Non nutritives et le plus souvent inconsciente. »

 

Il est divisé en deux catégories :

  • Il peut être primaire ou idiopathique c’est-à-dire non associé à une cause médicale où il est divisé en deux sous-catégories : bruxisme du sommeil ou nocturne et bruxisme de l’éveil ou diurne.

  • Il peut être secondaire ou en lien avec une cause bien définie comme l’apnée du sommeil, le reflux gastro-œsophagien (RGO), des maladies neurologiques, la prise de médicaments ou autre…

 

Pour certain, le bruxisme ne devrait pas être considéré comme une pathologie, mais plutôt apparenté à un comportement (Lobbezoo F. et al 2018)

Point anatomie :

Les temporaux et masséters sont les muscles principaux de la mastication, ils sont très puissants et commandés par le nerf trijumaux. L'articulation de la mâchoire est l'Articulation Temporo-Mandibulaire ou ATM.

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Position de repos mandibulaire physiologique :

- les mâchoires sont desserrées

- les dents ne se touchent pas

- la bouche est fermée est les lèvres se touchent sans tension

- la langue est étalée au palais sans contraction

- la respiration est nasale

Pourquoi sert-on des dents ? Contexte et cause.

Les origines du bruxisme sont complexes et le plus souvent multifactorielles. Il est très difficile d’identifier un seul facteur mais plusieurs pistes sont mises en avant et les causes sont à analyser au cas par cas. Le stress, une charge mentale, des habitudes, une prise de médicament ou une maladie peuvent séparément ou ensemble nous faire serrer des dents. Il est important de mettre en lumière les circonstances d’apparition et de développement de cette parafonction pour mieux la prendre en charge.

 

Le bruxisme primaire est une parafonction orale à ranger dans la catégorie des « manies », des « tics ». Dans ce cas on parle d’un réflexe oral, d’une habitude liée à la concentration par exemple, comme le fait de mâchouiller un stylo.

Il peut s’agir aussi d’un trouble du comportement lié à une hyperactivité chez l’enfant ou encore d’une activité de soupape liée au stress ou à l’anxiété.

Il peut être parfois secondaire à la prise de médicament, à des pathologies comme le Syndrome d’Apnée Hypopnée Obstructive du Sommeil (SAHOS) ou certaines maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson.

 

D’un point de vue purement mécanique il peut être à l’origine d’une dysfonction de la cinétique cranio-mandibulaire, c’est-à-dire un déséquilibre entre les tensions des muscles et fascias qui composent le crâne et la mâchoire. Dans ce cas la thérapie manuelle a toute sa place dans la diminution de certains symptômes liés au bruxisme.

Est-ce que l’on sert des dents car nos dents sont de travers ?

Les causes du bruxisme sont considérées comme centrales et non périphériques ce qui veut dire que cela viendrait du cerveau et non des dents. Les dernières études scientifiques discriminent donc les problématiques d’occlusion pure : ce n’est pas parce que nos dents ne se touchent pas bien bouche fermée que l’on va plus les serrer (Demir A et al.2004).

Est-ce que l’on sert plus des dents depuis que l’on porte un masque ?

Il n’a pas été établie de causalité directe entre le fait de porter un masque et l’action de serrer des dents, cependant il pourrait y avoir une corrélation. En effet, la tension des élastiques d’un masque sur les oreilles et les frottements du tissu sur le visage pourraient engendrer une réaction de contraction reflexe et nous faire serrer des dents.

Y a-t-il des facteurs de risques liés au bruxisme ?

Le stress, la consommation d’alcool et de café sont des facteurs de risque identifiés (Lavigne G. et al. 2003)

Quelle est la physiopathologie du bruxisme ?

La physiopathologie demeure encore partiellement connue. Il semblerait qu’il y est un lien avec le système nerveux autonome via l’activation du freinage parasympathique, en équilibrant l'activité orthosympathique de l'organisme.

Par conséquent et comme dans beaucoup de dysfonctionnement on ne peut apprécier que les conséquences de ce processus. Cependant, plusieurs liens de causalité ont déjà été prouvé dans la littérature scientifique (le stress, les troubles alimentaires, les troubles du sommeil, les reflux gastro-oesophagien…)

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Quels sont les symptômes et les conséquences du bruxisme ?

  • Locales :

    • Des lésions dentaires d’usure (8 % à 20 % de la population), photos ci-dessus.

    • Les Articulations Temporo-Mandibulaire douloureuses (ATM) pouvant dégénérer en DTM (voir article sur les DTM)

    • Des tensions douloureuses des muscles de la mâchoire

  • Régionale et à distance :

    • Des douleurs aux cervicales

    • Des douleurs aux épaules

    • Des maux de tête avec des acouphènes

    • Des troubles du sommeil

    • ...

Quelle est la meilleure solution ? La prise en charge la plus efficace ?

Il semblerait que la meilleure prise en charge soit issue de collaborations interprofessionnelles où chacun utilise ses connaissances et sa philosophie de soin pour apporter une solution globale et adaptée à chaque personne (Morin Ch. et al. 2018).

 

Dans le cas du bruxisme, les thérapeutes sont le dentiste, l’ostéopathe et le kinésithérapeute spécialisé en rééducation maxillo-faciale avec une participation active du patient. Celui-ci doit déjà prendre conscience qu’il sert des dents et identifier les facteurs qui pourraient causer ce bruxisme ainsi que la chronologie des évènements. S’il s’agit d’une habitude oral erronée ou d’un bruxisme causé par le stress, l’autogestion est primordiale.

Quels sont les rôles du dentiste, de l’ostéopathe et du kinésithérapeute ?

-Dentiste: Le dentiste va réaliser un bilan avec plusieurs points clés.

  • Il constate des abrasions des dents et réalise des restaurations si nécessaire.

  • Il doit dépister un éventuel SAHOS grâce l’interrogatoire médical et éventuellement la prescription d’une polysomnographie en cas de doute.  

  • Il dépiste également une dysfonction de la posture linguale et /ou de la respiration.

Il pourra proposer une gouttière qui ne résoudra pas le problème mais empêchera l’aggravation des usures dentaires et réduira la compression de l’ATM. Il réfèrera ensuite à l’ostéopathe et au kinésithérapeute pour une travail plus global sur la posture.

 

Fiche d’évaluation du Bruxisme à destination des patients et du dentiste/orthodontiste : https://www.information-dentaire.fr/wp-content/uploads/2020/11/4-evaluation-bruxisme.pdf

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-Orthodontiste : L’orthodontiste est chirurgien-dentiste donc il procédera comme un dentiste pour ce qui est du bruxisme. Il a un rôle très important pour la dynamique cranio-mandibulaire car son objectif est d’harmoniser les tensions maxillo-faciales via un traitement orthodontique. L’orthodontie ne s’occupe pas que de l’esthétique de la bouche et du sourire mais assure aussi la bonne phonation, déglutition, mastication et respiration.

Il a un également un rôle primordial chez les enfants car il peut faire du dépistage si l’enfant grince des dents ou respire par la bouche, ce qui est anormal.

 

-Ostéopathe : Son rôle est multiple. Premièrement il fait un interrogatoire poussé (anamnèse) avec lequel il déterminera la priorité de traitement et pourra référer chez le dentiste ou médecin d’abord si nécessaire. Ensuite il effectue une évaluation palpatoire par laquelle il va rechercher les tensions et constater des déséquilibres au niveau local (muscles masticateurs, ATM, crâne…) mais aussi locorégional (cervicales, épaules…). Enfin, il effectue son traitement avec des techniques manuelles afin de rééquilibrer l’appareil myo-fascial en éléminant les stress mécaniques. L’ostéopathe dispose de temps pour bien comprendre le patient et identifier les facteurs de risque. Il peut également lui proposer des techniques d’autogestion.

 

-Kinésithérapeute : L’approche du kinésithérapeute maxillo-facial est plus active. Il évaluera d’abord le bon fonctionnement des muscles de la langue et de la mâchoire puis proposera des exercices pour corriger les mauvaises habitudes si besoin. Son objectif est de bien expliquer et reprogrammer les automatismes des fonctions de déglutitions, de mastication, de phonation et de respiration. Il veillera également à la bonne position de la langue et montrera les bonnes pratiques pour que le patient soit totalement autonome.

 

Règle d’or ou priorité thérapeutique :

-Traiter la douleur et commencer par le traitement le moins invasif.

-Pour le bruxomane = Prise de conscience du serrement durant la journée et mise en place de simples techniques d’autogestion/ relâchement. Le patient peut également s’auto-masser, faire des étirements et ajouter de l’autogestion du stress avec un apprentissage de la relaxation par exemple.

STOP à l’auto-traitement par des gouttières ou appareillage en vente en pharmacie. Il est fortement déconseillé d’essayer de gérer ce problème sans consulter un professionnel de santé car sans un bilan précis et une solution adaptée cela pourrait empirer le phénomène. Une gouttière mal réglée par ses contacts occlusaux avec l’arcade antagoniste peut-être délétère en créant des Dysfonctions Temporo-Mandibulaires (DTM).

Conclusion

Le bruxisme est une habitude qu’a pris le corps pour se soulager d’un stress, d’une tension ou d’un déséquilibre. Il peut avoir lieu la journée et/ou la nuit pendant le sommeil.

Les causes sont multiples et variées ; elles peuvent être primaires c’est-à-dire sans lien de causalité direct, ou secondaire c’est-à-dire en lien avec une maladie, la prise de médicament ou autre. Les origines et facteurs de risque diffèrent d’une personne à l’autre.

Les conséquences ne sont pas que des préjudices fonctionnels mais peuvent réellement abimer le corps du patient sur le long terme

Résumé en 10 points :

  1. Le bruxisme n’est pas une maladie mais un comportement

  2. On ne se rend pas forcement compte que l’on sert des dents

  3. Le bruxisme n’est pas grave mais peut avoir des conséquences néfastes

  4. Il y a des conséquences locales et plus globale sur le corps souvent accompagnées de  douleurs

  5. Rôle du patient : se rendre compte qu’il fait du bruxisme, consulter un dentiste, éventuellement un orthodontiste, un ostéopathe ou un kinésithérapeute pour se faire accompagner, mettre en place une autogestion.

  6. Rôle du dentiste : dépister, surveiller, référer et proposer des gouttières pour éviter l’abrasion des dents et l’aggravation des tensions.

  7. Rôle de l’orthodontiste : dépister, surveiller, référer et proposer un traitement orthodontique adapté si nécessaire.

  8. Rôle de l’ostéopathe : dépister, surveiller, référer et proposer un traitement manuel pour équilibrer les tensions cranio-temporo-maxillo-faciale.

  9. Rôle du kinésithérapeute : dépister, surveiller, référencer et éduquer le patient dans sa phonation, déglutition, respiration. Attention aux solutions miracles ! La meilleure solution est une prise en charge interdisciplinaire et au cas par cas

  10. Attention aux solutions miracles ! La meilleure solution est une prise en charge interdisciplinaire et au cas par cas.

Quelques conseils pratiques : 

  • Prendre conscience que l’on sert des dents

  • Pincer les lèvres (technique du professeur Hartman : https://tmd-dentalmedical.org/,..)

  • Eviter de boire trop de café ou trop d’alcool

  • Eviter de mâcher des chewing-gums trop régulièrement

  • Commencer la cohérence cardiaque

Sources : 

-Approche ostéopathique du bruxisme - Dr Isabelle Hue

-Mal de dos, fatigue, Migraine… si vous serrez des dents ! – Pr Francis Hartmann, Chirurgien-dentiste

-Morin C, Desrosiers J, Gaboury I. Enablers and barriers to the development of interprofessional collaboration between physicians and osteopaths: A mixed methods study. J Interprof Care. 2018 Jul;32(4):463-472. doi: 10.1080/13561820.2018.1435515. Epub 2018 Feb 20. PMID: 29461138.

-Lobbezoo F, Ahlberg J, Raphael KG, Wetselaar P, Glaros AG, Kato T, Santiago V, Winocur E, De Laat A, De Leeuw R, Koyano K, Lavigne GJ, Svensson P, Manfredini D. International consensus on the assessment of bruxism: Report of a work in progress. J Oral Rehabil. 2018 Nov;45(11):837-844. doi: 10.1111/joor.12663. Epub 2018 Jun 21. PMID: 29926505; PMCID: PMC6287494.

-Demir A, Uysal T, Guray E, Basciftci FA. The relationship between bruxism and occlusal factors among seven- to 19-year-old Turkish children. Angle Orthod. 2004 Oct;74(5):672-6. doi: 10.1043/0003-3219(2004)074<0672:TRBBAO>2.0.CO;2. PMID: 15529503.

-Lavigne GJ, Kato T, Kolta A, Sessle BJ. Neurobiological Mechanisms Involved in Sleep Bruxism. Critical Reviews in Oral Biology & Medicine. 2003;14(1):30-46. doi:10.1177/154411130301400104

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Article rédigé par Benoît CHEGARAY, Ostéopathe à l’ESS Garches, en collaboration avec Dr Astrid Lambert, orthodontiste

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