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Votre santé

La douleur : comment ça se soigne ?

Qu’est-ce que la douleur ?

 

Selon l’IASP ( International Association for the Study of Pain) , la douleur est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée ou ressemblant à celle associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle"

 Cette définition pose d’emblée le caractère subjectif de l’expérience douloureuse.

Les patients sont dès lors seuls capables d’indiquer aux soignants ce qu’ils ressentent. Leur participation va être primordiale pour évaluer l’intensité de la douleur et l’efficacité des traitements proposés.

Le traitement de la douleur dépend de plusieurs facteurs :

1) La cause

2) Le type

  • Nociceptive : résultant de la stimulation des nocicepteurs (=récepteurs sensoriels qui assurent la transmission nerveuse du message douloureux). Pas de topographie neurologique, examen neurologique normal. (exemples : Brûlure, coupure, entorse, arthrose, douleurs viscérales…)

  • Neuropathique : résultant d’une lésion nerveuse périphérique ou centrale. Composante continue (brûlure), fulgurante, intermittente (décharge électrique), dysesthésie (fourmillements, picotements), compatible avec une origine neurologique périphérique ou centrale, signes d’hyposensibilité ou d’hypersensibilité à l’examen clinique (exemples : neuropathie diabétique, sciatique chronique, maladies neurodégénératives…).Le questionnaire DN4 permet d’évaluer la douleur neuropathique.

  • Mixte : associant à la fois le mécanisme nociceptif et neuropathique (exemple : douleurs cancéreuses)

  • Dysfonctionnelle ou nociplastique : résultant d’un dysfonctionnement des systèmes de contrôle de la douleur sans lésion associée (exemple : Fibromyalgie)

  • Associée aux soins

3) L’intensité (recours aux échelles d’autoévaluation comme l’échelle visuelle analogique, l’échelle visuelle numérique par exemple mais aussi les échelles d’hétéroévaluation comme l’algoplus chez la personne âgée par exemple)

 

4) La localisation

 

5) La temporalité : douleur aigue ? douleur chronique ?

 

6) L'environnement: (facteurs associés, influençant, favorisant)

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L’évaluation la plus précise possible de la douleur est donc un facteur déterminant et primordial à sa bonne prise en charge.

De quelles ressources thérapeutiques dispose-t-on ?

La prise en charge de la douleur repose sur l’utilisation combinée de thérapeutiques médicamenteuses et non médicamenteuses qui seront choisies et proposées au patient de façon personnalisée selon sa situation douloureuse.

Avant de proposer un quelconque traitement, il convient au préalable de :

  1. S’assurer que la plainte du patient est douloureuse

  2. S’assurer des caractéristiques de la douleur => S’agit-il d’une douleur nociceptive ? neuropathique ? mixte ? nociplastique ? associée aux soins ?

  3. Apprécier le retentissement de la douleur (contexte de douleurs chroniques notamment) => social, familial, psychique, activités et vie professionnelle, sommeil, autres symptômes associés

  4. Expliquer au patient que la douleur n’est pas nécessairement synonyme de gravité

  5. Eclairer le patient sur les mécanismes de ses douleurs afin de privilégier la compréhension et l’adhésion au traitement proposé

  6. Définir un objectif thérapeutique « raisonnable » avec le patient. Lui expliquer qu’il va être suivi et accompagné au long cours, que les traitements seront modulés au fur et à mesure suivant leur efficacité ou non à le soulager. Promouvoir la notion d’amélioration du confort, de la qualité de vie qui seront les boussoles qui guideront les propositions thérapeutiques qui lui seront faites.

  7. Toujours valoriser et faire participer le patient en lui précisant que le médecin est force de propositions mais que l’acteur principal reste le patient (« le médecin propose, le patient dispose »)

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L’intensité de l’arsenal thérapeutique déployé dépendra surtout du retentissement de la douleur sur le patient.

S’agit-il d’une douleur peu importante ? ou d’une douleur « Prison » qui enferme ?

Pour ce qui est de la gestion des douleurs chroniques neuropathiques : on partira en première intention sur une monothérapie. On expliquera au patient la nature du médicament choisi. On procédera à une titration progressive afin de favoriser la tolérance et l’adhésion au traitement.

En seconde intention, selon l’efficacité obtenue, on pourra proposer une association de médicaments.

A/ Les thérapeutiques médicamenteuses

  • Les antalgiques (voir encadré ci-dessous) : efficaces sur les douleurs nociceptives. Il en existe 3 classes et le choix se fera selon le mécanisme et l’intensité de la douleur.

  • Infiltrations articulaires de corticostéroïdes

  • Certains antiépileptiques : pour cibler les douleurs neuropathiques (Gabapentine (NeurontinÒ), Prégabaline (LyricaÒ), Carbamazépine (TegretolÒ)

  • Certains antidépresseurs : pour cibler les douleurs neuropathiques (les tricycliques comme l’amitriptyline (LaroxylÒ), Clomipramine (AnafranilÒ), Imipramine (TofranilÒ) mais aussi les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradréanaline comme la duloxetine (CymbaltaÒ), la venlafaxine (EffexorÒ) hors AMM, le milnacipran (IxelÒ)

  • Certains traitements topiques locaux anesthésiques : pour les douleurs neuropathiques localisées (Lidocaine emplâtre médicamenteux (VersatisÒ) hors AMM, patch cutané de capsaïne (QutenzaÒ) réservé toutefois à l’usage hospitalier et avec effet antalgique de 3 mois

  • La kétamine dans les douleurs chroniques rebelles notamment neuropathiques, en situation palliative

  • Toxine botulique de type A en injection sous-cutanée en traitement adjuvant et en cas d’échec des traitements conventionnels pour les douleurs neuropathiques chroniques. Usage hospitalier. Pas d’AMM pour le moment

  • Cannabis thérapeutique : dans le cadre de l’expérimentation menée par l’ANSM depuis le printemps 2021 sous forme d’huile (traitement de fond) et d’inhalation de fleurs séchées (accès paroxystiques). En traitement adjuvant des douleurs neuropathiques chroniques réfractaires aux thérapies (médicamenteuses ou non) accessibles

  • Les techniques analgésiques locorégionales et intrathécales dans certaines situations de douleur chronique comme les douleurs chroniques cancéreuses réfractaires, des douleurs chroniques neuropathiques réfractaires, les douleurs chroniques réfractaires non neuropathiques, les céphalées et les douleurs abdomino-pelviennes

  • Les techniques de radiologie interventionnelle : infiltrations de corticoïdes rachidiennes, périradiculaires, articulaires postérieures, épidurales, neurolyses ciblées, cimentoplasties, vertébroplasties, embolisations, blocs régionaux

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B/Traitement neurochirurgical de la douleur chronique

En situation de douleur chronique rebelle, des techniques neurochirurgicales de 3 types peuvent être utilisés :

  • Techniques lésionnelles interrompant la transmission du message douloureux par section des voies de transmission nociceptives (cordodomie, DREZotomie, myélotomie, hypophysectomie, cingulotomie)

 

  • Techniques de neuromodulation fondées sur la stimulation électrique chronique du système nerveux. Elles ont pour but de diminuer la douleur en renforçant les mécanismes physiologiques inhibiteurs de la douleur et de limiter les mécanismes activateurs. (neurostimulation implantée cérébrale, médullaire)

  • Analgésie intrathécale à base de morphine, zicotinide, ropivacaine à l’aide de pompes implantables

Chirurgie

C/Techniques non médicamenteuses

  • Approche rééducative et réadaptative faisant intervenir les masseurs-kinésithérapeutes

  • (massages, mobilisations articulaires, techniques de renforcement musculaire, techniques de facilitation neuromotrice, étirements, physiothérapie), ergothérapeutes, psychomotriciens, orthésistes, praticiens d’activité physique adaptée, ostéopathes

  • Approches psychocorporelles et psychothérapies : hypnose pour traiter la composante sensorielle de la douleur, méditation pleine conscience, musicothérapie, art-thérapie, psychothérapies, thérapies cognitivo-comportementales, yoga thérapeutique

En résumé : 

-le traitement de la douleur dépend de plusieurs facteurs: la cause, le type, l'intensité, la localisation, la temporalité, l'environnement

-L’évaluation la plus précise possible de la douleur est un facteur déterminant et primordial à sa bonne prise en charge

-il existe trois catégories de ressources thérapeutiques contre la douleur: médicamenteuse (ex: doliprane, ibuprofen...), neurochirurgicale (opération d'une compression du nerf comme dans le cas de la hernie discale par exemple), non-médicamenteuse (kinésithérapie, ostéopathie...)

Sources bibliographiques : 

-A.Serrie, C.Delorme, M.-L.Navez. Médecine de la douleur pour le praticien. Elsevier Masson.2020

-SFETD. Recommandations et référentiels

-N. Attal. Toxine boulinique A et douleurs neuropathiques. Bulletin de l’Académie Nationale de Médecine. 204 (2020). pp.379-385

-Référentiel. Techniques analgésiques loco-régionales et douleur chronique. Recommandations formalisées d’experts (SFAR-SFETD)

-Expérimentation cannabis médical base de ressources formation prescripteurs douleurs neuropathiques

-Mise au point sur l’utilisation de la kétamine. SFAR 2018

-C.Barry, B.Falissard. Evaluation de l’efficacité de la pratique de l’ostéopathie. Inserm. 2012

-S.Carbonneau. Diminution des symptômes de la fibromyalgie par l’ostéopathie : revue de la littérature. 2021

-G.Tosti. La douleur, je fais face avec l’hypnose ! Editions in Press.2021

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Article rédigé par Dr Laura PIQUION, médecin de la douleur à l’ESS Garches

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